Yacine Sif El Islam et Stanislas Briche

Catégorie(s) : Ils ont séjourné ici

France

Du 10 au 14 novembre 2023 (résidence d'écriture) - Du 4 au 8 décembre 2023 (résidence de création)

Discipline

Danse / Théâtre / Performance

Biographies

Yacine Sif El Islam, revient pour une seconde résidence à la Maison des écritures. Formé à l’EstBA en tant que comédien, il poursuit un travail de metteur en scène et d’auteur et propose des formes au carrefour du théâtre, de la danse et de la performance. Depuis septembre 2021 Yacine Sif El Islam et Benjamin Yousfi ont ouvert L’Avant-poste, une maison d’art et de convivialité à La Réole (33)

Le travail de Stanislas Briche se situe entre théâtre, danse et performance. Suite à une formation de comédien, il danse pour Catherine Bäy ou François Chaignaud et collabore avec Annie Vigier & Franck Apertet, Ivana Müller, Geisha Fontaine, Frédéric Nauczyciel, La Horde et Olivier Dubois avant d’écrire ses propres chorégraphies. Avec une curiosité pour les projets les plus éclectiques, il se produit aussi bien sur la scène de l’Opéra Bastille, qu’en club, cabaret ou centres chorégraphiques

Projet de résidence

Yacine Sif El islam travaille aujourd’hui à l’écriture d’Agnus Dei, deuxième volet d’un dyptique consacré aux violences intimes et politiques : ABUS.Poursuivant son travail transdisciplinaire, de la littérature au théâtre, qui intègre aussi la danse et l’art plastique, Yacine Sif El Islam collaborera à l’occasion de cette résidence avec le danseur Stanislas Briche.

Partenariats

En coopération avec La Manufacture CDCN Nouvelle-Aquitaine

Les rendez-vous

Premier regard (sortie de résidence) jeudi 7 décembre à 18h30.

Réservation/renseignements CDCN : 05 46 43 28 82 / larochelle@lamanufacturecdcn.org

Notre rencontre avec Yacine

La déraison du plus fort

Un thé, plutôt qu’un café. Dans la petite cuisine-coulisse de La Manufacture, on s’accorde avec Yacine pour ne pas perdre de temps. Yacine est arrivé le matin, repart dans cinq jours, et dans ce court délai, il doit mener à bien l’installation de son nouveau spectacle, Agnus Dei, le deuxième volet de son triptyque interrogeant les violences intimes et politiques de notre époque.

« Le premier volet, Sola Gratia, parlait d’abord des violences intimes, telles que j’avais pu les ressentir dans ma chair. C’était un spectacle de consolation, avec des choix esthétiques qui visaient l’épure, le blanc. Avec Agnus Dei, j’ai voulu prendre une direction très différente. Je m’intéresse d’abord aux violences politiques, et ce n’est plus la consolation que je cherche, mais bien la confrontation. »

Le spectacle a commencé à s’écrire lors d’une précédente résidence à La Rochelle, cet été, et s’est poursuivi à L’Avant-poste, l’espace de création de Yacine Sif El Islam à La Réole, en Gironde. Parmi les influences, l’auteur cite Genet, Pasolini, Riboulet mais ce sont bien ses propres mots qu’il entend performer. « La bonne réception de Sola Gratia m’a rassuré sur la valeur de mon écriture. Je veux proposer une réflexion sur le corps persécuté par la violence politique, en tissant trois niveaux de récit : l’anecdotique, avec une part autobiographique, le politique, en renvoyant au fait divers, et le mythique, comme matrice de toutes les histoires de violences. »

Pour traverser ces trois strates, Yacine s’est attaché à la figure de l’agneau, parce qu’il lui est apparu qu’elle pouvait prendre des formes très diverses et répondre à son propos. L’agneau, c’est ainsi la figure du « mouton noir », qui renvoie le jeune homme à certains stigmates de son enfance. Mais l’agneau, c’est aussi l’Agneau de Dieu, qui enlève les péchés du monde, ou encore les moutons de l’Aïd, dont il garde des images et des odeurs très prégnantes.

La douceur et la vulnérabilité de l’animal ne doivent pas tromper sur ce qui va se dérouler sur le plateau. Le comédien prend grand soin de préciser que la performance abordera de manière très frontale la question des violences qu’on fait subir aux corps. Yacine et le performer Stan Briche seront deux figures s’affrontant, l’une en armure, l’autre dans une nudité primale, et il ne sera pas question d’éluder les effets de ce déséquilibre. « Mon corps sera mis en tension. Il y a un jeu avec la douleur, la souffrance, que je veux explorer. C'est une violence consentie à laquelle j'ai besoin de me confronter. Je laisse au public la liberté de s'y confronter aussi. Après tout, sublimer la violence par l'art, c'est une manière de l'éloigner. Je pense que c'est le rôle de l'art de nous donner à voir les choses comme elles sont. »

Ce nouveau séjour rochelais sera l’occasion d’expérimenter les dispositifs scéniques, notamment le travail sur la lumière, et d’effectuer une première sortie de résidence. Quelques essais de son nous rappellent qu’on travaille d’arrache-pied sur le plateau voisin. Yacine s’éclipse pour voir ce qui se trame, et ne reviendra pas. Le temps a filé, on a fini notre thé.

© Texte de Philippe Guerry

©Julien Chauvet - ville de La Rochelle